Résultats des examens de 9e année : cinq départements déjà publiés
Alors qu’il était très en vue à la fin du XXe siècle, le métier de tailleur est en déclin au cours des deux dernières décennies en Haïti. Les professionnels de ce domaine sont confrontés à de sérieux défis en raison notamment de la libéralisation du marché.
Chaque année, des tonnes de vêtements usagés ou neufs en provenance des États-Unis et d’autres pays étrangers envahissent le marché haïtien, mettant en péril de nombreux secteurs économiques, y compris l’industrie de la couture.
En effet, ces vêtements de seconde main qui finissent parfois très rapidement dans les poubelles, occupent la quasi-totalité du marché avec un prix nettement inférieur à ceux fabriqués par des tailleurs, couturiers ou designers locaux. Ainsi, pour des raisons économiques, la majorité des personnes ont tourné le dos à la couture haïtienne.
Cette situation entraîne, entre autres, une baisse significative de la demande de services des tailleurs locaux. Les tailleurs peinent à rivaliser avec ces vêtements usagés communément appelés « Pèpè » disponibles en grande quantité sur le marché et à bas prix. Cela entraîne également la fermeture de certains ateliers de couture, mais aussi une dévalorisation de cette profession.
« Dès mon plus jeune âge, mon père m’a enseigné l’art de manier les machines à coudre, qui constituaient sa principale source de revenus. À l’âge de 17 ans, j’étais capable de confectionner mon propre pantalon et ma propre chemise. Grâce à ce métier, il avait la possibilité de prendre soin de notre famille », se souvient le Dr Rock Didier Marcelin, médecin de profession.
De nos jours, la plupart des personnes qui exercent exclusivement cette profession connaissent de grandes difficultés économiques. Les données ont totalement changé dans le mauvais sens, regrette-t-il, en exigeant que les autorités concernées mettent en place des garde-fous pour protéger certains métiers libéraux, victimes de la libéralisation outrancière du marché local.
« À défaut de nous confier la confection de leurs vêtements, les gens ont sollicité notre service uniquement à des fins de réparation des habits usagés achetés à vil prix sur le marché », déplore Carène Victor, jeune couturière diplômée qui n’a pas caché son admiration pour la couture et la mode.
« J’aime bien la couture et la mode mais il est presqu’impossible en Haïti de faire carrière dans cette profession », a regretté cette jeune fille, dénonçant un manque de soutien de l’État.
Cette passionnée de la couture et de la mode, critique les gens en particulier les jeunes qui préfèrent porter des vêtements étrangers pour exhiber les marques. Ils font fi de la couture haïtienne, a-t-elle poursuivi.
La rentrée scolaire l’ultime chance pour les tailleurs
Pour cette catégorie de professionnels, la rentrée des classes est la seule période de l’année dans laquelle ils sont véritablement sollicités.
En dehors de la période précédant la rentrée scolaire, les tailleurs se retrouvent au chômage pour le reste de l’année.
« C’est une profession pratiquement saisonnière qui ne peut guère assurer la subsistance de ma famille. Par conséquent, je dois trouver une alternative », déplore Boss Franck avant d’ajouter “grâce à la couture, j’ai acquis une solide réputation. C’est le fruit de mes 20 ans de carrière. Cependant, aujourd’hui, je n’ai plus la même passion pour ce métier. Je suis désolé de constater qu’il n’y a presque plus de demande, se plaint le septuagénaire.
Au-delà des facteurs économiques, la disparition des tailleurs locaux aurait également un impact sur la culture haïtienne. En effet, les vêtements fabriqués par les tailleurs locaux sont souvent très recherchés, car ils reflètent l’artisanat local et la créativité typique du pays.
De l’avis de certains observateurs avisés, si cette profession devait disparaître, nous perdrions une grande partie de notre identité culturelle.