Alors que la capitale est secouée par une vague de violence, les dirigeants haïtiens s’enfoncent dans une crise politique profonde, au détriment d’une population qui ne demande qu’à vivre en paix sur son propre territoire. Le bras de fer entre le Conseil présidentiel de Transition (CPT) et le Premier ministre Garry Conille a pris une tournure plus sévère ce dimanche avec une résolution du CPT visant à démettre ce dernier de ses fonctions. Conille a immédiatement rejeté la décision, rappelant que seul le Parlement peut le révoquer, et enjoignant la Presse nationale à ne pas publier l’acte, qu’il qualifie d’illégal.
Cette guerre de pouvoirs entre un CPT avide de domination et un chef du gouvernement jugé arrogant et déterminé à défendre sa légitimité, plonge encore davantage le pays dans l’impasse. Incapables de mettre de côté leur égoïsme et leur désir de contrôle, ces dirigeants montrent une fois de plus leur déconnexion de la réalité et leur mépris pour le bien-être du peuple. La violence continue de ravager la capitale, au point que la compagnie aérienne Spirit a essuyé des tirs ce lundi 11 novembre, contraignant un de ses vols à atterrir en territoire voisin et poussant d’autres compagnies à annuler leurs vols prévus pour le mardi 12 novembre 2024. Pendant ce temps, les écoles ferment leurs portes, privant de nombreux enfants d’éducation dans un contexte déjà désespérant.
L’incapacité à coopérer entre frères : le CPT tourné vers l’étranger
Le président du Conseil présidentiel de Transition (CPT) semble résolu à cultiver des liens avec l’étranger, manifestant un intérêt pour collaborer avec le président américain élu Donald Trump. Une démarche qui paraît ironique, alors même qu’il reste incapable de trouver un terrain d’entente avec ses propres compatriotes, ceux-là mêmes pour lesquels il prétend agir. Cette velléité de coopération internationale tranche avec une inaptitude criante à instaurer un semblant de stabilité au sein du pays, où chaque jour apporte son lot de violences et de crises.
Ce contraste soulève des interrogations profondes sur les priorités du CPT, qui semble ignorer la nécessité d’un front commun au sein même de ses rangs. En Haïti, la désunion au sommet de l’État devient une arme supplémentaire de destruction, exposant la population à un chaos quotidien. Alors que le président du CPT se projette dans des relations avec des puissances étrangères, il échoue à bâtir la moindre entente constructive avec les forces vives de sa propre nation, où la rivalité et les conflits d’intérêts l’emportent sur le bien commun.
Dans un pays en proie à une crise humanitaire et sécuritaire sans précédent, le choix du CPT de tourner son regard vers l’extérieur apparaît déconcertant. Loin d’apporter des solutions concrètes à leurs concitoyens, ces élites, engluées dans leur soif de pouvoir et de reconnaissance, accentuent chaque jour un peu plus la fracture sociale et la misère qui dévorent le pays.
À ce climat s’ajoute la dénonciation du chef de gang Jimmy Chérizier, alias Barbecue, leader de la coalition Viv Ansanm, qui soulève des questions quant à l’intégrité du CPT. Dans une déclaration récente, Chérizier a remis en cause la légitimité de trois conseillers accusés de corruption, qui siègent toujours au sein du conseil malgré les scandales les entourant. « Comment peut-on envisager de destituer le Premier ministre tout en tolérant la présence de conseillers corrompus ? » a-t-il interrogé, jetant une lumière crue sur l’impunité qui gangrène l’institution.
Cette critique s’accompagne d’un climat de tension extrême dans la capitale. Des quartiers entiers, notamment ceux de Bas-Delmas, se retrouvent sous le joug de violences incontrôlées, obligeant des familles à fuir leurs maisons, au péril de leur vie. Des pertes en vies humaines sont déjà à déplorer, des pillages et incendies nocturnes viennent alourdir ce sombre tableau. Au petit matin de ce lundi, plusieurs habitations ont été pillées et réduites en cendres dans le quartier de Vivi Mitchell , accentuant un climat de désespoir parmi des citoyens déjà laissés pour compte par leurs dirigeants.
Le CPT, entêté, prévoit d’organiser malgré tout, ce lundi 11 novembre, une cérémonie officielle pour le nouveau Premier ministre qu’il a choisi, en dépit du chaos ambiant de cette journée. Ce mépris affiché des dirigeants pour la population rappelle tristement qu’en Haïti, « chen grangou pa jwe » – un chien affamé, ne joue pas – illustrant combien les priorités du peuple diffèrent de celles des avares de pouvoir.
P.M