À l’image de nombreux secteurs, le système de santé haïtien, déjà précaire, subit de plein fouet l’aggravation du climat d’insécurité qui règne dans le pays. Près de 75 % des infrastructures sanitaires, qu’il s’agisse d’hôpitaux publics ou privés, de pharmacies, de centres de santé ou de dispensaires, ont été pillées, voire incendiées. Ces attaques exacerbent les faiblesses d’un système sanitaire déjà obsolète et mal équipé pour faire face à une telle crise.
Dans ce contexte marqué par une polarisation croissante et des agressions répétées contre le personnel soignant, l’accès aux soins de santé est devenu un défi quasi insurmontable en 2024. Devant les rares hôpitaux encore épargnés par les violences dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, des malades et leurs familles patientent pendant des heures, parfois des jours, pour recevoir des soins, allant d’un simple pansement à une intervention médicale complexe.
Malgré les efforts acharnés du personnel médical, certains patients succombent faute de prise en charge adéquate. Le ministère de la Santé n’a fourni aucun bilan précis des décès survenus dans les couloirs des hôpitaux, mais les responsables rapportent une augmentation alarmante des cas mortels chaque semaine.
Une pénurie de médicaments alarmante
À cette situation dramatique s’ajoute une pénurie de médicaments sans précédent. En 2024, selon l’Association des pharmaciens, Haïti a subi deux importantes ruptures de stock dues à la fermeture des ports et de l’aéroport, conséquence directe de la violence généralisée. Cette absence de médicaments essentiels a eu des effets dévastateurs sur la santé de milliers de personnes.
Dans des villes comme Pilate, Gros-Morne, Liancourt ou Verrettes, plusieurs hôpitaux ont dû fermer leurs portes, même face à une demande de soins croissante. Dans la capitale, les rares structures encore fonctionnelles peinent à répondre aux besoins : manque de lits, pénurie de personnel qualifié, urgences mal équipées et insécurité omniprésente.
Coup fatal porté à l’Hôpital Bernard Mevs
Un coup fatal a été porté au système de santé lorsque l’Hôpital Bernard Mevs, seul centre de traumatologie et de neurologie du pays, a été détruit dans la nuit du 17 au 18 décembre. Une attaque orchestrée par des individus armés a réduit à néant cet établissement vital, qui abritait des équipements médicaux modernes. Les pertes sont estimées à des milliards de gourdes, privant ainsi près de 12 millions de personnes d’un accès à des soins spécialisés.
L’Hôpital Universitaire de la Paix : un îlot de résilience
Malgré un contexte chaotique, l’Hôpital Universitaire de la Paix (HUP) continue de se battre pour offrir des soins. Suite à la fermeture de grands établissements comme Saint-François de Sales et l’Hôpital Français, l’HUP est devenu un pilier essentiel. Débordé par l’afflux de blessés par balles, il parvient néanmoins à sauver de nombreuses vies.
Cependant, le manque criant de personnel médical complique davantage la tâche. Peu rémunérés et confrontés à des conditions de travail précaires, de nombreux professionnels de santé quittent le pays pour chercher de meilleures opportunités. Ceux qui restent doivent affronter une charge de travail écrasante, souvent sans matériel adéquat ni soutien psychologique.
Un ratio alarmant
Avec moins d’un médecin pour 10 000 habitants, Haïti présente un des pires ratios au monde en matière de soins de santé. Cette situation risque de se détériorer encore davantage face à l’exode massif des professionnels, contraints de fuir une crise sociopolitique et sécuritaire sans précédent.