Dialogue inter-haïtien en Jamaïque : la montagne a accouché d’une souris

À six mois de la fin du mandat du Conseil présidentiel de transition (CPT), le constat est implacable. Quatre coordonnateurs se sont succédé à la tête de l’instance chargée de restaurer l’ordre démocratique et la sécurité. Tous ont multiplié les promesses. Aucun n’a infléchi le cours des choses. Alors que Laurent Saint-Cyr prend les rênes du CPT, une question hante désormais les esprits : à quoi peut-on encore s’attendre ?
Créé pour redresser un pays à genoux, organiser des élections crédibles et rétablir la sécurité dans un territoire livré aux gangs, le CPT n’a, jusqu’ici, atteint aucun de ses objectifs. La violence s’aggrave, l’insécurité s’étend, la crise humanitaire s’intensifie, et les institutions s’effondrent.
Edgard Leblanc Fils : des mots… et puis rien
7 mai 2024 – 7 octobre 2024 : Représentant du Collectif 30 janvier, Edgard Leblanc Fils est désigné le 30 avril et installé le 7 mai 2024. Se voulant rassembleur, il mise sur le consensus, la priorité à la sécurité et la « libération du pays de ceux qui le font souffrir ». Sa seule action marquante reste un discours prononcé à la tribune des Nations unies, le 26 septembre 2024. Un discours resté sans suite, sans effet.
Leslie Voltaire : promesses sans lendemain
7 octobre 2024 – 7 mars 2025 : Représentant de Fanmi Lavalas, Leslie Voltaire annonce cinq priorités : finalisation du CEP, transparence administrative, sécurisation des routes, relance institutionnelle… Aucun axe routier n’est libéré comme promis. Il se contente d’inaugurer des projets hérités de l’ère Jovenel Moïse. Les promesses se sont envolées, le statu quo est resté.
Fritz Alphonse Jean : un “budget de guerre” sans bataille
7 mars 2025 – 7 août 2025 : L’économiste Fritz Alphonse Jean, représentant de l’Accord Montana, parle d’« union sacrée », d’un « budget de guerre » et salue l’Accord du 3 avril. Mais derrière la rhétorique, aucune stratégie sécuritaire concrète. Les territoires perdus aux gangs se multiplient, et l’État recule chaque jour un peu plus.
Laurent Saint-Cyr : le dernier à y croire ?
7 août 2025 – 7 février 2026 : Homme d’affaires et représentant du secteur privé, Laurent Saint-Cyr affiche un ton grave : « L’heure n’est plus aux beaux discours, c’est le moment d’agir. » Il promet de reconquérir les zones sous contrôle des gangs et commence par remplacer le directeur général de la Police nationale : Jonas Vladimir Paraison prend la place de Rameau Normil. Mais la lassitude domine. La population réclame des résultats, pas des mots. Et le scepticisme l’emporte sur l’espoir.
Une mission en échec
Dès sa création, le CPT avait quatre objectifs clairs :
- Organiser des élections crédibles
- Rétablir la sécurité
- Répondre à la crise humanitaire
- Restaurer la gouvernance
Six mois avant la fin du mandat, aucun de ces objectifs n’est atteint. La violence s’intensifie, les services publics s’effondrent, et la population perd foi en ses dirigeants. L’impasse est totale, au point que certains parlent d’une « présidence inutile ».
Laurent Saint-Cyr hérite d’un pays exsangue et d’un Conseil discrédité, miné par des accusations de corruption et des luttes internes. Le temps joue contre lui. Et contre la nation tout entière. Le pays attend un miracle. Mais Haïti n’en reçoit plus depuis longtemps.