Absence de l’immigration devant les hôpitaux : stratégie discrète ou assouplissement des mesures ?

Le Fonds National de l’Éducation (FNE) a publié, ce lundi 9 juin, un rapport dans lequel il révèle l’ampleur du désastre éducatif provoqué par l’insécurité généralisée en Haïti. À travers des données glaçantes et des témoignages recueillis auprès de 6 244 familles déplacées et 422 établissements scolaires affectés, le FNE dresse un état des lieux accablant de la situation de l’éducation dans le pays.
Fruit d’un travail mené par une commission de sept membres dirigée par Charles Alex Mathieu Julien, ce rapport met en lumière un échec collectif : celui d’un pays incapable de protéger le droit fondamental à l’éducation. Délocalisation massive des écoles, déscolarisation d’enfants, précarité extrême des familles, manque de soutien humanitaire, obstacles logistiques à la collecte de données… tout y est. Le FNE lance un appel pressant à une réponse publique d’urgence.
Depuis 2023, la violence des gangs, notamment dans l’Ouest, l’Artibonite, le Centre et le Grand Sud, a entraîné la fermeture de centaines d’écoles. Selon un article de Prensa Latina daté du 22 mai 2024 et cité dans le rapport, près de 900 écoles ont cessé de fonctionner dans l’Artibonite et l’Ouest. À Port-au-Prince, certaines écoles publiques sont aujourd’hui transformées en abris pour déplacés.
Face à cette crise, certains directeurs tentent de relocaliser leurs établissements dans des zones plus sûres, mais les nouveaux sites sont souvent précaires, sans ressources, ni subventions, ni cantines. Dans le cadre de son Projet d’Appui aux Écoles et Familles d’Élèves Victimes de l’Insécurité (PAEF), le FNE a mené deux enquêtes en parallèle : l’une auprès des familles déplacées, l’autre auprès des écoles relocalisées, afin de mieux orienter les aides.
Un taux de déscolarisation de 38,41 %
L’enquête menée auprès de 6 276 familles (dont 6 244 ont répondu, soit un taux de réponse de 99,49 %) couvre 65 communes dans sept départements. Le profil des répondants est majoritairement féminin : 70,31 % sont des femmes.
Le rapport indique que ces familles déplacées ont à leur charge 16 604 enfants, dont 14 736 sont en âge scolaire. Avant leur déplacement, 13 624 étaient inscrits à l’école. Aujourd’hui, seuls 9 473 poursuivent leur scolarité. Autrement dit, 5 233 enfants ont abandonné l’école, soit un taux de déscolarisation de 38,41 %.
Les causes sont multiples : manque de moyens financiers, destruction ou fermeture d’établissements, refus d’inscription dans les écoles d’accueil, éloignement, perte de documents, problèmes de santé ou de motivation. Mais la raison principale est économique : 37,32 % des familles déclarent ne pas pouvoir payer les frais de scolarité.
Précarité extrême et absence de soutien
94,12 % des familles déplacées ont perdu leur principale source de revenu. Près de 69 % vivent avec moins de 15 000 gourdes par mois. Seules 3 % d’entre elles ont un revenu supérieur à 60 000 gourdes. Et pourtant, 94,55 % n’ont reçu aucune aide à la scolarisation, et 97,73 % n’ont bénéficié d’aucune aide humanitaire ces six derniers mois. Résultat : 91 % des familles ne peuvent plus assumer les frais de scolarité, et 89 % sont actuellement endettées.
Les conditions de logement sont tout aussi alarmantes : 77,18 % des familles vivent dans des maisons, mais 9,40 % sont dans des abris de fortune, 268 familles sont réfugiées dans des camps, 115 dans des écoles ou facultés, et 4 familles dorment carrément dans la rue.
Des écoles abandonnées, sans subventions ni cantines
Sur les 429 écoles ciblées par l’étude, 422 ont participé (98,37 %). 193 établissements (45,73 %) n’opèrent plus sur leur site d’origine, dont 187 relocalisés à cause de l’insécurité, en grande majorité dans le département de l’Ouest.
La situation alimentaire est aussi critique : 81,04 % des écoles ne disposent d’aucune cantine. Parmi les écoles déplacées, seules 6 ont une cantine. Sur le plan financier, 92,89 % ne reçoivent aucune subvention.
L’enquête elle-même a été menée dans des conditions difficiles. Sur 100 enquêteurs mobilisés, 95 ont pu intervenir sur le terrain, sans matériel adéquat, sans badges officiels, sans logistique suffisante. Le manque de communication institutionnelle, l’insécurité, les coûts de transport et la brièveté de l’enquête (5 jours) ont été des obstacles majeurs.
Un cri d’alarme pour l’avenir
Le FNE conclut avec des recommandations claires : renforcer la planification stratégique, améliorer les moyens logistiques, mieux valoriser les enquêteurs, renforcer la présence institutionnelle sur le terrain et garantir un accompagnement durable.
Mais derrière les chiffres, ce sont des milliers d’enfants privés d’avenir, des familles en détresse, et un système éducatif en ruines. Le rapport est un cri d’alarme. Reste à savoir qui l’entendra.
D.D