
Entre 2024 et 2025, le marché des sextoys en Haïti connaît une véritable révolution. Les consommateurs, de plus en plus avertis, affinent leurs choix et recherchent des produits spécifiques pour répondre à leurs besoins intimes. Ce changement de comportement s’observe notamment chez les femmes, mais aussi chez certains hommes, qu’ils soient hétérosexuels ou homosexuels, qui se tournent vers ces objets de plaisir.
Une demande croissante et des choix plus pointus
Les témoignages de Gallingdo Bellegarde, PDG de 24Kara Store, une entreprise spécialisée dans la vente de jouets sexuels, et de Lania, entrepreneure active dans l’e-commerce, révèlent une évolution marquante des attentes des consommateurs. Autrefois, les clients recherchaient simplement des “jouets sexuels”. Aujourd’hui, ils s’intéressent aux différentes catégories, notamment les “Ti flè”, des sextoys en forme de fleur dotés de langues vibrantes, de pénétrateurs ou des deux.
Ce modèle est particulièrement apprécié pour sa polyvalence. Certaines femmes privilégient une stimulation clitoridienne, d’autres préfèrent une stimulation vaginale, et certaines combinent les deux. Ce raffinement dans le choix des sextoys témoigne d’une prise de conscience accrue des besoins sexuels.
Lania, dans la vingtaine, confie avoir passé trois commandes entre janvier et novembre 2024 et être déjà à sa deuxième commande entre décembre 2024 et janvier 2025. Pour elle, un homme incapable de procurer le même plaisir que sa “petite fleur” ne mérite même pas de la courtiser.
Les réseaux sociaux, catalyseurs du boom des sextoys
L’essor de ces objets est largement boosté par les réseaux sociaux, en particulier TikTok, où des femmes partagent librement leurs expériences, expliquant comment ces appareils améliorent leur plaisir. Ce phénomène contribue à briser les tabous entourant la sexualité et alimente une croissance fulgurante des ventes.
Selon Gallingdo Bellegarde, les ventes ont doublé par rapport au début de l’année 2024, une tendance qui ne montre aucun signe de ralentissement.
Qui achète des sextoys en Haïti ?
Le profil des acheteurs est varié :
• Les célibataires, en quête de satisfaction personnelle.
• Les jeunes adultes (18-23 ans), qui explorent leur sexualité en toute discrétion.
• Les femmes en couple, cherchant à compenser certaines lacunes dans leur vie sexuelle.
• Les hommes, qui achètent des sextoys masturbateurs pour eux-mêmes ou des jouets pour leurs partenaires.
Une législation ambiguë et une importation controversée
Malgré cet essor, la loi haïtienne encadre strictement l’importation de certains produits érotiques. L’article 52 du Code douanier interdit l’entrée de “figures, films ou autres objets d’un caractère obscène ou pornographique”. Pourtant, la vente de sextoys en ligne s’est démocratisée.
L’avocat Me Ternilus Jean Gardy estime que la saisie des sextoys par la douane est illégale, car le terme “sextoy” n’est mentionné nulle part dans la loi. Certains juristes vont plus loin, affirmant que ces objets ne relèvent pas de la pornographie, mais sont plutôt considérés comme des outils de bien-être intime.
Un sondage réalisé par Ticket Magazine en 2021 révélait que 53,6 % des Haïtiens utilisent des sextoys. Parmi eux :
• 42 % les utilisent avec leurs partenaires.
• 22 % préfèrent une utilisation en solo.
• 36 % les combinent dans les deux contextes.
Santé et enjeux logistiques
Si la satisfaction des utilisateurs est généralement positive, certaines contraintes demeurent :
• Entretien rigoureux : pour éviter d’endommager l’appareil, l’eau ne doit pas pénétrer dans les composants électroniques.
• Logistique délicate : les boutiques doivent garantir une livraison discrète, car certaines restrictions douanières peuvent compliquer l’expédition si les colis ne sont pas bien emballés.
Quels risques pour la santé ?
Une étude menée par les universités Duke et Boone en 2022 met en garde contre les risques sanitaires liés aux sextoys. Elle souligne notamment la présence de phtalates, des perturbateurs endocriniens pouvant affecter la fertilité. Des analyses ont révélé que certains sextoys contenaient 24 à 60 % de phtalates en poids.
L’étude met aussi en avant l’exposition aux nano et microplastiques, dangereux pour la santé et l’environnement, soulevant ainsi la nécessité d’une réglementation stricte pour garantir la sécurité des utilisateurs.
Un marché en pleine mutation
La vente de sextoys en Haïti connaît une dynamique sans précédent, portée par la démocratisation des produits, l’influence des réseaux sociaux, et une évolution des mentalités sur la sexualité.
Toutefois, l’absence de réglementation claire pose la question de la reconnaissance juridique de ces objets en Haïti. L’État suivra-t-il la tendance mondiale ou continuera-t-il à freiner l’importation des sextoys ? L’avenir du marché érotique en Haïti reste à écrire.