
À l’ONU, le président haïtien réclame une force internationale « robuste »
À la tribune de la 80ᵉ Assemblée générale des Nations unies, ce jeudi 25 septembre, le président du Conseil présidentiel de transition (CPT), Laurent Saint-Cyr, a dressé un constat alarmant : Haïti est « un pays en guerre », livré aux gangs qui contrôlent la majeure partie de la capitale et plongent la population dans une tragédie humanitaire sans précédent. Tout en saluant l’action de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), il a plaidé pour la mise en place d’une « force robuste », dotée de moyens conséquents, afin de rétablir l’ordre, contenir la menace régionale et préparer des élections « honnêtes et crédibles ».
« Une tragédie aux portes de l’Amérique »
« Chaque jour, des vies innocentes s’éteignent sous les balles, le feu et la peur », a lancé Laurent Saint-Cyr, décrivant des quartiers rayés de la carte, plus d’un million de déplacés internes, des hôpitaux incendiés et des centaines de femmes et de filles victimes de viols. « Voilà le visage d’Haïti aujourd’hui : un Guernica contemporain, une tragédie humaine à seulement quatre heures de vol d’ici », a-t-il martelé, exhortant la communauté internationale à rompre avec « le silence et l’inaction ».
Une mission internationale dépassée
Créée en 2023 sous commandement kényan, la MMAS n’a déployé qu’un millier d’hommes sur les 2 500 prévus, faute de financements et d’équipements. S’il a salué le courage des policiers haïtiens et des soldats kényans tombés dans les combats, le chef de l’État de transition a reconnu l’échec relatif de cette mission, incapable de contenir la puissance des gangs. Les États-Unis et le Panama militent désormais pour la création d’une nouvelle force de 5 500 hommes, intégrant également des militaires, une option que Laurent Saint-Cyr soutient pleinement.
Une menace régionale
« Haïti est à l’épicentre d’une menace régionale inédite », a averti le président du CPT, pointant des réseaux criminels transnationaux lourdement armés qui cherchent à contrôler les économies locales. Selon lui, ignorer la crise haïtienne équivaut à laisser l’instabilité se propager dans toute la Caraïbe et sur le continent américain.
Transition politique et horizon électoral
Réaffirmant la légitimité du CPT, né d’un consensus politique soutenu par la CARICOM, Saint-Cyr a rappelé que l’organisation d’élections libres et crédibles demeure une priorité. Près de 85 % des centres de vote sont déjà identifiés, 70 % du personnel électoral mobilisé, et 65 millions de dollars de financement national sont garantis. Mais, reconnaît-il, « la sécurité reste le plus grand obstacle ».
Relance économique et mémoire historique
Le président de la transition a également insisté sur la relance économique à travers des pôles de développement dans le Nord et le Sud (agro-industrie, textile, énergies renouvelables, tourisme). Il a plaidé pour le renouvellement de la loi américaine HOPE/HELP et rappelé qu’en 2025, Haïti marquera le bicentenaire de la « rançon de l’indépendance » imposée par la France. Annonçant la création d’un Comité national pour les réparations, il a invité Paris à « écrire une nouvelle page de justice et de vérité ».